J’ai une collègue, Nina, qui est un vrai remède à toutes les pannes de bonne humeur.
Et une vraie blonde même si à l’heure actuelle sa couleur de cheveux s’apparente plus à du rouge…. Mais ça ne va pas durer, elle change tellement vite que c’est bien difficile de la suivre.
Une vraie blonde, estampillée, en droite ligne avec les blagues du même nom… au point que je l’ai soupçonnée un temps de frôler la caricature pour amuser la galerie.
Mais j’ai du me rendre à l’évidence… même pas…
C’est surtout une crème de gentillesse pourvu d’un rire communicatif imparable. La fille indispensable dans une équipe pour mettre du moelleux dans les relations.
On se demandait ce qu’elle avait depuis une semaine. Mais ce ne sont pas ses ragnagnas, ni les derniers ragots en date qui la troublent. Nina est tout bonnement amoureuse. Ok, ok… ça lui arrive fréquemment. Il y a eu le Bodybuildé de la maintenance, il y a eu l’Ephèbe de la gestion, il y a eu le Bo Gosse du marketing et il y a même eu l’Intello du service statistiques…Elle a eu autant de coups de cœur que de couleurs, c’est tout dire.
Mais aujourd’hui, c’est différent ! En trois jours, elle a réussi à se renverser une armoire sur la tête, à se prendre les pieds dans le fil du téléphone pendant que le directeur avait une très importante conversation avec l’Asie, à se manger une porte vitrée en avançant résolument dessus, et à démonter la photocopieuse alors qu’il suffisait de remplir le chargeur de papier.
Et hier, nous avons enfin toutes compris. Elle est entrée en salle de réunion pour servir le café. Et puis soudain, elle a sursauté, s’est étalée les quatre fers en l’air projetant au plafond son plateau, les gobelets posés dessus et le café qu’elles contenaient.
Passé le moment de surprise, alors que le café n’avait pas encore fini de retomber en minuscules gouttelettes sur la moquette claire et tandis que le directeur commençait à s’étouffer de rage contenue, notre gaffeuse favorite avait disparu.
Elle était en train de courir dans les locaux en tous sens, comme une poule décapitée, faisant admirer son tailleur jaune nouvellement pourvu de pois odorants, annonçant son très probable licenciement et ne pouvant réprimer un fou rire nerveux et strident.
Nous nous y sommes mises à cinq pour cacher les agissements de Nina, détourner l’attention de l’assemblée et remettre un peu d’ordre. Difficile de faire tout ça en gardant son sérieux mais nous sommes super entraînées.
J’étais perdue dans l’observation du boss qui se décrispait très très très lentement lorsque je compris que Jocelyne et Isabelle essayaient désespérément d’attirer mon attention sur l'autre bout de la table.
Là bas, Simon, le nouveau stagiaire, d’un très joli teint fraise des bois, ne semblait pas conscient d’avoir un gobelet sur la tête ni même que ses lunettes ruisselaient encore… Son regard perdu, son allure pétrifiée et son sourire béat en disaient long.
Nous nous sommes longuement regardées toutes les cinq, pensant tellement fort qu’on pouvait s’entendre : « C’est peut être bien la fin du célibat pour notre cœur d’artichaut favori mais, quoi qu’il en soit, à la prochaine embauche masculine, on déclenche un plan de surveillance rapproché. »
Ahhhhh, ces hétérotes !